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Dolph LUNDGREN
dans Joshua Tree

by Marc Toullec, Impact (France), #42, December 1992

Dolph Lundgren, comme certains personnages de la Bible, retourne régulièrement faire pénitence dans le désert, Le sable et la poussière plein les Rangers, il a déjà connu ça dans Le Scorpion Rouge et Universal Soldier, Mais ce même sable, cette même poussière ont un passé glorieux, le western, sur lequel Joshua Tree compte beaucoup pour jouer la différence.

Si Universal Soldier n'apporte rien à la gloire de Jean-Claude Van Damme, Dolph Lundgren, lui, en sort grandi. Grandi d'avoir incarné un vilain comme il les affectionne, pas bavard, monolithique, mâchant quelques mots lourds de menace et arborant un faciès de granit. Non, le grand Dolph, un mec très doux, très gentil au demeurant, ne récidive pas dans Joshua Tree. Il est aujourd'hui le héros, le bon, celui qui redresse les torts et sauve la veuve, puis l'orphelin. Il est Wellman Santee, un ancien pilote automobile passé du mauvais côté de la barrière. Un sale coup du destin. Aujourd'hui, Santee convoie des voitures volées à travers le désert. C'est d'ailleurs là, durant un casse, qu'il se heurte, avec son complice, à un flic. Le flic meurt, le complice aussi. Et Santee porte le chapeau. Il est écroué dans une prison de sécurité maximale. Au terme de quelques mois à l'ombre, il s'évade, déboule dans un dîner très coquet, vole une voiture et prend en otage sa conductrice, Rita Marek, une jeune femme en passe de devenir shérif. Santee ne pouvait pas plus mal tomber, surtout que le Lieutenant Severance lance à ses trousses un bataillon de flics. Severance est un dur à cuir, un accro de la vieille école. Et un ripoux qui a intérêt à dégager le fugitif de la circulation. Malgré un sacré déploiement de force, Santee parvient à gagner Los Angeles. Devant le comité d'accueil monté par un "ami", il détale aussi sec, réintègre le désert. Tandis que sa prisonnière multiplie les tentatives d'évasion, l'étau se resserre inexorablement. Ce sont maintenant des hélicoptères qui le pourchassent. Mais la tension entre Santee et Marek s'étiole progressivement; la femme-flic connaît le passé, connaît la vérité, la culpabilité de Severance et les raisons de ses efforts pour retrouver son partenaire de galère. Désormais, Santee et Rita font cause commune alors que l'heure de l'ultime affrontement approche...

A première vue, cette histoire de chasse à l'homme bien poussiéreuse ne casse pas trois pattes à un canard. Mais c'est fait exprès, en hommage comme on dit, pour retrouver le secret d'un cinéma d'action oublié, un peu périmé. "Joshua Tree contient tous les ingrédients que je recherchais, un scénario qui se tient, des personnages forts qui évoluent au fil de l'action, et aussi des réminiscences des classiques du western que j'admire tant, ainsi que des traces des road-movies des années 70 comme Le Guet-Apens et Electra Glide in Blue". Electra Glide in Blue ou lorsqu'un motard de la police s'identifie à un justicier du far west; Le Guet-Apens ou le polar selon Peckinpah à son zénith... "Bien sûr, j'ai immédiatement contacté le producteur de Joshua Tree pour lui faire part de mon enthousiasme. A ma grande surprise, il m'a appris que ce manuscrit ne m'était aucunement destiné, qu'il m'avait été envoyé par erreur". N'empêche que Vic Armstrong décroche le morceau et, vu son passé cinématographique, y parvient sans trop de problème. De La Fille de Ryan en 1970 à Terminator 2 en passant par Superman, Les Aventuriers de l'Arche Perdue, Total Recall et quelques James Bond, Armstrong possède l'une des plus éloquentes filmographies de responsable de cascades. Il est l'un des rares de sa spécialité à avoir franchi le cap, à être devenu metteur en scène à part entière. Souhaitons lui une carrière autrement plus honorable que celle de Hal Needham, arrangeur laborieux des carambolages mous de la série Cannonbal notamment.

Vic Armstrong a des ambitions autres que celles d'un mauvais froisseur de tôle. Ce qu'il envisage: toiletter le film d'action américain en mettant l'accent sur ses vertus antédiluviennes. "Tout Joshua Tree s'apparente à une espèce de conte opposant des bons à des sales types. Cela implique aussi de super-voitures complètement exotiques et des poursuites automobiles sophistiquées". Vic Armstrong semble certain de son coup, certain que son film va redonner un coup de fouet à un cinéma de divertissement pantouflard. "Le public en a plus qu'assez de toujours payer pour les mêmes scènes d'action. Il exige non seulement une histoire excitante, mais également une façon originale de la raconter. Joshua Tree combine tous ces éléments, ainsi que des personnages de femmes qui ne sont pas des clichés, des victimes toute désignées" rajoute la productrice Illana Diamant. En bref, Joshua Tree compte énormément sur ses grosses bagnoles et leurs dérapages pour se sortir du lot. Et, au même titre, sur son décor principal : le désert.

Un désert au curriculum-vitae impressionnant. Là, dans ce morceau de Californie, la poussière et la rocaille ont bien plus de gueule qu'ailleurs. "Dès que nous sommes sortis de nos véhicules, nous avons aussitôt anticipé sur les séquences à venir, Lorsque j'ai appris que tant de chefs-d'oeuvre y avaient été tournés, j'ai immédiatement compris" explique Vic Armstrong. Des westerns bondissants et amidonnés avec Hopalong Cassidy et Gene Autry, La Charge de la Brigade Légère, Gunga Din, La Grande Evasion avec Bogart, Nevada Smith et d'autres ont visité le patelin. De quoi donner confiance à un cinéaste dilettante, même si celui-ci s'est fait la main sur quelques épisodes de la série Young Indiana Jones. Pour mieux humer encore le parfum du vieux cinoche américain, Vic Armstrong plante ses caméras, pour une cascade parmi les plus secouantes du film, dans une gare minuscule réduite à sa plus simple expression: des rails à perte de vue et une baraque. C'est pourtant là que le manchot Spencer Tracy débarque en 1955 dans Un Homme est Passé. Encore de quoi insuffler un sentiment mêlé de fierté et de respect à toute l'équipe de Joshua Tree.

Si beaucoup sont fiers d'avoir balancé depuis des parapets des bolides dans le vide, Dolph Lundgren n'a pas démérité. Non seulement il accomplit lui-même la plupart des cascades "pour ne pas tromper l'audience avec des doublures", mais, de surcroît, il apprend à piloter des engins pas possibles pour se hisser à la hauteur de son personnage et ceci sous les directives d'as du volant. Rebelote : le géant scandinave s'identifie totalement au bon vieux héros de westerns traqué par un shérif ripoux à la solde d'un propriétaire terrien véreux. Pour lui, les grosses voitures dérapant sur la caillasse brûlante du désert du Nevada ne sont que des substituts aux canassons d'autrefois. De plus, le comédien porte nonchalamment la winchester sur l'épaule, posture mythique adoptée par plus d'un John Wayne, d'un Gary Cooper. "Santee est un rebelle dans la tradition, un anti-héros qui hésite longtemps entre justice et illégalité pour finalement pencher du côté de la loi. Comme son principal protagoniste, Joshua Tree revient aux valeurs essentielles du cinéma américain, Il apporte un courant d'air frais à des luttes tournant inlassablement autour de terroristes, de politiciens véreux et de trafiquants de drogue" plaide le grand Dolph. La nouveauté par le classicisme. En ces temps de retour au western, les racines mêmes du cinéma hollywoodien, le calcul des producteurs de Joshua Tree n'est pas une opération du hasard. Le titre du film porte déjà en lui toute une mythologie; les "arbres de Joshua" étant cette espèce d'intermédiaire entre le cactus et l'arbre s'épanouissant là où fleurissent desesperados et justiciers étoilés, le film de Vic Armstrong trouve, par un accessoire aussi indispensable que le colt 45 rouillé et le stetson troué, un joli trait d'union entre le vieux et le recyclage du vieux. Reste à savoir si les quatre roues ont le souffle aussi long que les quatre pattes...

Marc TOULLEC

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